29/03/2014
Hubert Mingarelli : Marcher sur la rivière
Hubert Mingarelli, né en 1956 à Mont-Saint-Martin en Lorraine, est un écrivain français. A 17 ans il arrête l'école pour s'engager dans la marine qu'il quitte trois ans plus tard. Entre-temps il a pu voir la Méditerranée et le Pacifique. S'ensuivent des voyages à travers l'Europe. Il finit par s'installer à Grenoble où il exerce de nombreux métiers. Il commence à publier à la fin des années 1980. Il est lauréat du Prix Médicis en 2003 pour son roman Quatre Soldats. Il vit aujourd'hui dans un hameau de montagne des Alpes françaises. Le roman Marcher sur la rivière est paru en 2007.
Après quelques pages à peine je me suis fais la réflexion qu’il était inadmissible pour moi de ne pas mieux connaitre cet écrivain. J’avais été impressionné à l’époque, par La lettre de Buenos Aires mais je n’avais fait aucun effort depuis pour découvrir la vingtaine d’autres bouquins de l’écrivain. Il a fallu que la presse se fasse l’écho de la parution récente de L’Homme qui avait soif pour que j’aille piocher dans les rayonnages de la bibliothèque municipale.
Dans un pays qui n’est pas cité mais qu’on devine être à l’étranger, au soleil de l’Afrique du Sud dans mon idée, Absalon le narrateur est un jeune homme avec une patte folle et l’âme jamais en paix. Il a décidé de quitter son village, prendre le bus et aller voir la mer. Des liens le retiennent au village et freinent son départ. Il y a son père taiseux, s’obstinant à construire un nouveau toit à sa cabane en utilisant le métal de boites de conserves, pressé par la saison des pluies qui approche. Notre héros a un ami, Emmeth le pompiste à qui il sert de confident et une amie de cœur – encore que ce soit surtout à sens unique – Rosanna qui tapine gentiment avec les habitués de la salle de billard. Les autres personnages, ce sont le pasteur Lithébé et sa femme qui fait beaucoup d’effet à Absalon. Et puis cet étrange Georges Msimangu dont le camion est garé dans le lit à sec de la rivière, roues avant retirées et une tente au cul, où il loge.
Absalon est un jeune innocent, dans le sens de naïf, qui ne nuit pas, n’est pas dangereux, certainement pas toujours bien net dans sa tête mais très attachant. Quand le roman s’achève, on ne sait pas quel sera son destin, on lui souhaite le meilleur mais on craint aussi qu’il n’ait pas les armes nécessaires pour affronter la ville et le monde extérieur. Mais qui sait ?
Il n’y a pas vraiment d’histoire dans ce roman, des zones d’ombre ne seront jamais éclairées, des faits passés non explicités, des choses mystérieuses restent en suspens, or croyez-le ou non, mais il s’agit pourtant d’un délicieux roman. Hubert Mingarelli confirme ce que j’avais entrevu lors de la lecture du premier ouvrage qui me l’a fait découvrir, il a un ton bien personnel et une écriture exceptionnelle qui vous happe dès que le livre s’ouvre. Le roman est fait de chapitres extrêmement courts et de phrases très maigres. Dans Le Monde du 14/03/2014, l’écrivain déclare « Si je peux faire une phrase en cinq mots, je n’en mets pas sept. Ne jamais, jamais tirer à la ligne. » Quelle belle profession de foi quand elle aboutit à un tel résultat !
Un écrivain à découvrir impérativement.
« Les collines existaient bien, mais pas la rivière. Je veux dire une rivière avec de l’eau, des berges, et tout ce qu’on s’attend à voir autour. Mais il parait qu’elle avait existé. Je ne savais pas si c’était vrai, j’avais perdu mon opinion. Son existence, on la tenait de gens qui étaient morts maintenant depuis longtemps. Peut-être qu’ils avaient menti. C’était tellement sec là-bas qu’il fallait avoir une grande confiance pour le croire. »
Hubert Mingarelli Marcher sur la rivière Editions du Seuil – 247 pages –
08:18 Publié dans Français | Tags : hubert mingarelli | Lien permanent | Commentaires (0) | Facebook |